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Les diverses tribulations et pérégrinations de Sofia

Caution, le blog que vous vous apprêtez à lire emploie un langage parfois cru, morne et insipide, et risque de vous faire perdre un temps considérable. Avant de vous engager plus loin, soyez sûr de votre décision.

Le pouvoir hallucinogène de l'herbe

Publié le 15 Novembre 2014 par Sofia

Etendue là dans l’herbe, de tout mon long, laissant une alizée caresser ma peau et les chauds rayons de l’astre solaire m’effleurer délicatement, je ne pense plus à rien. A rien sauf à cette odeur délicieusement entêtante d’herbe et de terre. Je ferme les yeux pour mieux savourer ce rare instant de répit, où je peux respirer sans me sentir suffoquer.

Je le vois, Light. Il fait probablement ses exercices de maths, son ami Marcus le serrant dans ses bras, comme pour profiter d’une quelconque chaleur humaine. Je le vois, Light. Son visage pâle où des tâches de rousseur viennent le rendre plus attendrissant encore, ses yeux bridés et vairon : les deux sont marron mais le gauche est partagé avec du bleu-gris, comme pour signifier aux plus poètes que le ciel de son existence est nuageux. Ses traits réguliers offrent une certaine constance à ce personnage. Je le vois, Light. Il se lève après avoir capuchonné son stylo plume, s’avance avec grâce là ou moi, Sofia, suis couchée sur le ventre. Je pleure à l’écoute des trois morceaux qu’il m’a un jour envoyés, et que j’ai découverts des mois après. Coïncidence ou non, ils traduisaient avec exactitude mon état d’esprit : morose. Mais il s’arrête devant moi, et, alors que l’air de rien je sèche mes larmes, il se couche sur moi pour me protéger de ces pensées malheureuses me guettant et qui pourraient à nouveau m’assaillir. Trop désabusée pour y croire vraiment, j’imagine que c’est la thanatopractrice qui me sert dans ses bras en guise de salut. Et, plus très sûre de moi, j’ose prononcer de ma voix apaisée :

« - Qui que ce soit, merci, j’en avais besoin. »

Inspirant plus profondément dans l’herbe pour retenir olfactivement ce sublime moment de doute où tout est possible, mon nez distingue une senteur plus poivrée, plus corsée. Ma frimousse se fronçant ; et lui (car finalement il s’avère que c’est lui) déposant un baiser dans le cou, près de mon oreille entendant son souffle régulier et lent, sur cette peau fine qui n’en est que plus réceptive à cette tiédeur affolante ; j’exhale un soupir d’aise. Je ne me pose plus de questions, profitant ainsi du silence de mon âme. Je crois rêver. Pourtant, je sens la pression de son corps sur le mien, ses belles mains fourrager dans ma chevelure et son cœur battre la mesure de mon désir.

Je pense à ouvrir les yeux, mais ne le fais pas, mes larmes ayant collé mes paupières. Tant mieux, je pourrai davantage me concentrer sur son odeur à la fois douce et virile. Mon cœur crie, hurle, chante. Oui, je l’aime. Je l’aime, je le sais désormais, je l’ai toujours su mais tu. Lui que j’ai tant admiré, lui qui m’a mise dans tous mes états – les meilleurs comme les pires – lui aussi qui m’a rendue inapte à m’exprimer tant j’étais abasourdie par sa beauté subjugante… Je l’aime. Alors pourquoi ne pas ouvrir mes yeux et poser mon regard sur cette peau que je souhaite caresser ? Parce que si je décolle mes paupières, mes lèvres se retrouveront irrémédiablement attirées vers les siennes, si roses et pleines. Nos deux langues se mêleront alors, nos deux souffles s’accélèreront et s’entrecouperont, concluant ainsi un pacte unique et éternel.

Mon cœur se fait plus discret, et se tait peu à peu, laissant ma tête exposée au raisonnement infaillible de mon esprit aidé de mon instinct. Cette voix se fait de plus en plus forte, de plus en plus percutante, choquante, blessante, assommante : ouvre les yeux ! Non, je ne veux pas. Ouvre les yeux ! Non, je n’en ai pas besoin. Ouvre les yeux ! Non, je sais. OUVRE LES YEUX !! Non, je le sens contre moi. Et, poussée par ma curiosité dévastatrice, mes yeux s’ouvrent d’eux-mêmes.

Alors même qu’ils se sont ouverts, tout disparaît : la tiédeur dans mon cou, les picotements le long de ma colonne vertébrale, la pression exercée par « lui ». Tout simplement car lui n’est pas à mes côtés, mais encore à cinquante mètres de moi à faire ses exercices. Mon cœur s’est définitivement tu, ainsi que mon esprit, tous les deux coupables – l’un de m’avoir menti, l’autre de m’avoir montré la vérité. Je capture encore son image et refourre mon nez dans cette herbe : je peux encore y croire. Tout est possible sous ce soleil réchauffant la terre portant cette herbe.

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